Les civelles au Grau-du-Roi

Mardi 5 février : montaison des civelles au Grau-du-Roi…

par Vincent Marty.

Malgré des températures dissuasives, nous étions sept adhérencivelles1ts de Gard Nature pour cette sortie nocturne sur le thème des civelles et anguilles.

Cette sortie s’est greffée sur une nuit de piégeage scientifique de l’Office National de l’Eau et des Milieux Aquatiques (ONEMA) qui suit la remontée des civelles sur tout le bassin méditerranéen français. Ce protocole de piégeage et de suivi doit permettre d’affiner les connaissances sur les périodes d’arrivée des civelles sur nos côtes ainsi que les conditions pour la remontée dans les fleuves.
La capture de civelles est totalement interdite en Méditerranée, et l’ONEMA bénéficie ici d’une autorisation de capture à des fins scientifiques

Le piégeage a débuté pour moi à 19h00 (dès la tombée de la nuit). Le piège, une sorte de nasse à maille fine, est tendu sous un ponton.

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Nous ne capturons pas de civelles lors des deux premières levées de pièges, qui doit être relevé toutes les demi-heures.
Dès l’arrivée des deux premiers adhérents, les civelles sont présentes ! Trois civelles sont prises à la levée de 20h30…

Après 21 h 00, nous sommes finalement dix, sept adhérents avec trois personnes de l’ONEMA.

Nous évoquons la biologie de l’anguille, avec son cycle complexe, ses différents stades de développement (Leptocéphale, civelle, anguille jaune, anguille argentée), sa migration de 6000 kilomètres pour se reproduire en mer des Sargasses (de l’autre coté de l’Atlantique), les mystères qui persistent sur sa biologie malgré les nombreuses études scientifiques… Nous parlons également des problèmes et menaces qui pèsent sur cette espèce amphihaline (qui vit alternativement en eau douce et en eau salée).

Nous relevons plusieurs fois le piège mais ne dépassons jamais 6 civelles prises par demi-heure…
Le vent se lève un peu et commence à nous refroidir, nous prenons alors un thé bien chaud avec un carré de chocolat… cela devrait nous permettre de tenir un peu plus longtemps !

Nous recevons la visite de deux jeunes pêcheurs du Caylar, qui se présentent comme « pêcheurs du dimanche ». Nous sommes pourtant mardi… !
Ils sont intrigués par ces bêtes qu’ils décrivent comme bizarres, translucides et rosées.

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Nous leur expliquons de quoi il s’agit et les raisons du piégeage scientifique. Ils repartent avec un petit laïus explicatif sur l’anguille… Puis reviennent avec un poisson anguilliforme dans leur épuisette en nous demandant : « quelle âge elle a celle-ci ? » .
Nous attrapons la bête qui mesure 25-30 cm. Mais qui semble très claire pour une anguille… tout le monde est intrigué. En effet, dans cette zone en contact direct avec la mer, on peut trouver d’autres poissons serpentiformes, qui sont le Congre et la Murène (tous deux poissons de mer).
La forme de la tête et surtout l’absence de nageoires pectorales nous permettra de penser qu’il s’agit d’une murène. Le livre des poissons de mer ( pris à l’origine pour illustrer la répartition de l’anguille) nous aura bien servi !
(Quelqu’un a-t-il une photo ?)

Le piégeage se termine à minuit, et nous nous rendons sur le seuil de Saint-Laurent-d’Aigouze, afin de constater un des problèmes qui se pose pour l’Anguille : les barrages à la migration.
L’ensemble des barrages construits par l’Homme sont autant d’obstacles pour la montaison des poissons migrateurs. Cela vaut pour l’Anguille comme pour l’Alose (ou le Saumon dans d’autres régions). Des systèmes existent afin d’aider les civelles à remonter les cours d’eau, mais peu d’ouvrages sont équipés, et un travail important d’information et de soutien financier reste à faire.
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Le seuil de Saint-Laurent-d’Aigouze devrait être équipé dans l’année d’un système pour les civelles et anguilles (il est déjà équipé pour les Aloses). Le seuil juste à l’amont, à Marsillargues est déjà équipé des deux systèmes, avec une passe à Aloses et des « Evergreen », sortes de plots en bétons de quelques centimètres de haut (ressemblant à des boîtes à œufs) permettent aux civelles et anguilles de franchir ce barrage.

Le froid humide du Vidourle et les débits importants qui ne nous permettront pas de voir le système de montaison du deuxième seuil ont raison de nous…
C’est donc à 00h30 et par 1°C que nous nous séparons sous un ciel magnifiquement étoilé.