Jeudi du frigo du 14 octobre 2010

« jeudis du frigo » : c’est la rentrée
Cette première soirée, animée par Christophe, sera consacrée aux plantes invasives.
L’occasion également pour Maryvonne et Jean-Laurent de nous parler de l’action collaborative engagée par le SMAGE du Gardon à ce sujet.
Pour ceux qui souhaitent partager un repas tiré du sac : rendez-vous à 19h au Mas du Boschet Neuf à Beaucaire. La soirée proprement dite débutera à 20h.
Renseignements auprès de Jean-Laurent

Les plantes invasives dans l’espace méditerranéen

Par Christophe, octobre-novembre 2010

Nous sommes en train de vivre la sixième grande extinction biologique qu’à connue la vie sur notre planète, cette fois provoquée par l’humanité : pollution, la fragmentation des écosystèmes (urbanisation, agriculture intensive), la surexploitation des ressources naturelles et les invasions biologiques. Ce constat, réalisé par l’Organisation des Nations-Unies place les invasions biologiques comme l’une des causes de régression de la biodiversité à l’échelle mondiale. Voyons comment les plantes invasives menacent les milieux naturels dans l’espace méditerranéen français.

QUELQUES NOTIONS

Une espèce invasive

Une espèce invasive est une espèce vivante exotique à caractère envahissant. C’est un agent de perturbation nuisible à la biodiversité autochtone et aux écosystèmes dans lesquels elle s’établit. L’arrivée d’une « invasive » dans la nature est permanente et difficilement réversible. En réalité, il faudrait parler de « population invasive » et non d’espèce invasive (l’espèce n’est pas invasive partout).

Exemple :

  • le Robinier faux-acacia Robinia pseudacacia est originaire du Sud-Est des Etats-Unis. Il été introduit volontairement en Europe au début du XVIIe siècle. Aujourd’hui, 130.000 hectares (= 1300 km2) de bois et de forêts françaises sont en Robinier (hors ripisylves, arbres isolés ou minoritaires dans les boisements). Le Robinier se resème naturellement, il rejette de souche et drageonne abondamment lorsqu’il est coupé. Sa présence est durable sur notre territoire et difficilement réversible (à l’inverse des chênes par exemple qui ne drageonnent jamais). Les populations européennes de cet arbre peuvent donc être caractérisées d' »invasives ».
Une espèce envahissante

Une espèce envahissante est une espèce vivante autochtone à caractère envahissant. Comme chez les invasives, les espèces envahissantes présentent un caractère pionnier euryèce (= à grande capacité d’adaptation et de compétitivité), qui dans certaines circonstances, font qu’elles colonisent dans grands territoires (se comptant en milliers d’hectares). La perturbation des écosystèmes générée n’est pas aussi forte, dans la mesure où ces espèces font partie intégrante des écosystèmes locaux depuis des millénaires. L’arrivée d’une espèce envahissante dans la nature est souvent temporaire et réversible. Comme pour les invasives, il faudrait parler de « population envahissante » et non d’espèce envahissante (l’espèce n’est pas envahissante partout).

Exemple :

  • le Pin d’Alep Pinus halepensis est un arbre autochtone du sud de la France (attesté dans les études de charbons et de pollens datant de plusieurs milliers d’années). Charles Flahaut écrivait à la fin du XIXe siècle que cet arbre était absent à l’ouest de Montpellier. Aujourd’hui, il est devenu très commun de la frontière espagnole à Montpellier. L’arbre a rapidement proliféré dans les zones de déprise agricole et a il été largement favorisé par la multiplication des incendies. Il couvre 240.000 hectares de superficie (soit 2400 km2) en Languedoc-Roussillon et en PACA. Les populations françaises de cet arbre peuvent donc être caractérisées d' »envahissantes ».
Une espèce pionnière

Les végétaux qui possèdent des populations envahissantes ou invasives présentent toutes un trait de caractère « pionnier ». Cela signifie que ces espèces affectionnent les endroits « neufs », qu’ils soient remués, décapés, instables, etc. Ces perturbations peuvent être générées par les activités humaines (agriculture, urbanisation, infrastructure, industrie,…) ou au contraire par des évènements naturels (inondations, tempêtes, séismes ou glissements de terrains). Ces plantes poussent beaucoup plus vite que les autres végétaux, c’est pourquoi il leur est possible de coloniser rapidement la quasi-totalité de l’espace perturbé. Ce sont également des végétaux qui ont une grande plasticité de comportement et qui ne sont pas exigeants : ils s’adaptent à tous types de sols, d’exposition, de topographie (espèces euryèces).

Exemple :
La colonisation du Marais d’Orx (Landes) par les Jussies Ludwigia spp. Après la mise en culture du polder, 600 ha de marais ont été remis en eau en 1989. Le site étant dénudé, les jussies ont colonisé la totalité de la surface du marais en quelques années. Des phases d’assèchement ou de traitement chimique n’y ont rien changé puisque la Jussie est la première plante à repousser après toute nouvelle perturbation du milieu. Les Jussies exotiques sont donc des plantes pionnières notoires.

Une espèce naturalisée

Une espèce naturalisée est un végétal d’origine exotique qui s’est tout d’abord acclimaté dans une autre région du monde. Non seulement elle parvient à se développer, à fleurir et à produire des graines ou des rejets mais surtout elle réussit à se multiplier sans l’aide de l’homme. Toutes les plantes invasives en France sont des espèces qui se sont naturalisées. Mais beaucoup de plantes horticoles exotiques ne parviennent pas à se naturaliser chez nous. Par exemple les Pélargoniums, le Bougainvillier et bien d’autres plantes ne survivent pas dans la nature, soit parce qu’elles sont gélives soit parce qu’elles ne résistent pas à la concurrence des végétaux autochtones.

Exemple :
La vigne-vierge à cinq folioles Parthenocium quinquefolia pousse à proximité immédiate des habitations parce qu’elle y a été plantée mais cette liane se resème spontanément dans la nature loin de toute habitation et ces pieds produisent eux-mêmes des fruits et des semences viables. Cette vigne-vierge peut donc être considérée comme naturalisée en France.

Une espèce spontanée

Une plante spontanée parvient à s’implanter, à se développer et à se multiplier seule dans la nature, sans aide volontaire de l’homme. Nombre de plantes spontanées se maintiennent toutefois dans les espaces agricoles, du fait du travail du sol. Un grand nombre de plantes exogènes spontanées sont en fin de compte des plantes adventices (= des cultures) ou rudérales (= des terrains remués). On parle d’espèces subspontanées lorsque l’on a affaire à des végétaux qui s’étendent dans la nature uniquement à proximité des lieux où ils ont été introduits ou plantés. On parle de plantes non spontanées lorsque la multiplication d’une plante est impossible dans la nature.

Exemple :
Les cèdres cedrus spp sont subspontanés dans l’espace méditerranéen. Ils parviennent à se resemer uniquement dans les environs immédiats d’où les semenciers ont été plantés. En revanche, la plupart des Cyprès Cupressus spp horticoles sont non-spontanés car il leur est impossible de se multiplier en dehors des endroits où ils ont été plantés.

LE TOP 15 DES ESPECES LES PLUS PROBLEMATIQUES DANS L’ESPACE MEDITERRANEEN

Arbres

Espèce Menaces Littoral Marais Rivières Plaines Garrigues Cévennes Villes et villages Milieu agricole
Robinier faux-acacia Fort x x x x x x
Ailanthe élevé Fort x x x x x x
Févier d’Amérique Moyen ? x x x
Erable négundo Moyen ? x x

Arbustes

Espèce Menaces Littoral Marais Rivières Plaines Garrigues Cévennes Villes et villages Milieu agricole
Renouées arbustives Fort x x x
Faux-Indigo Fort x x x
Baccharis Fort x x
Buddléja de David Fort x x x
R Fort

Plantes herbacées terrestres

Espèce Menaces Littoral Marais Rivières Plaines Garrigues Cévennes Villes et villages Milieu agricole
Impatience de l’Himalaya Fort x x x
Impatience des jardins Fort x x x
Barbon andropogon Fort x x x
Herbe de la Pampa Fort x x x x x
Griffes de sorcière Fort x x

Plantes aquatiques

Espèce Menaces Littoral Marais Rivières Plaines Garrigues Cévennes Villes et villages Milieu agricole
Caulerpe Fort x
Jussies Fort x x x

PRESENTATION DES 15 ESPECES LES PLUS PROBLEMATIQUES

Le Robinier faux-acacia Robinia pseudacacia

Origine : Introduit au début du XVIIe siècle en provenance du Sud-Est des Etats-Unis.
Utilisations :
Modes de propagation :
Problèmes :

L’Ailanthe élevé Ailanthus altissima

Origine : Introduit au … siècle en provenance de Chine.
Utilisations :
Modes de propagation :
Problèmes :

Le Févier d’Amérique Gleditsia triacanthos

Origine : Introduit au … siècle en provenance des Etats-Unis.
Utilisations :
Modes de propagation :
Problèmes :

L’Erable Négundo Acer negundo

Origine : Introduit au … siècle en provenance de …
Utilisations :
Modes de propagation :
Problèmes :

La Renouée du Japon Reynoutria japonica

Origine : Introduit au … en provenance de …
Utilisations :
Modes de propagation :
Problèmes :

La Renouée de Sakhaline Reynoutria sachaleinsis

Origine : Introduit au … en provenance de …
Utilisations :
Modes de propagation :
Problèmes :

Le Faux-IndigoAmorpha fruticosa

Origine : Introduit au … en provenance de …
Utilisations :
Modes de propagation :
Problèmes :

Le Baccharis Baccharis halimifolia

Origine : Introduit au … en provenance de la côte Sud-Est des Etats-Unis
Utilisations :
Modes de propagation :
Problèmes :

Le Buddleja Buddleja davidii

Origine : Introduit au … en provenance de Chine
Utilisations :
Modes de propagation :
Problèmes :

L’Impatience de l’Himalaya Impatiens glandulifera

Origine : Introduit au … en provenance de la chaîne de l’Himalaya
Utilisations :
Modes de propagation :
Problèmes :

L’Impatience des jardins Impatiens balfouri

Origine : Introduit au … en provenance d’Asie
Utilisations :
Modes de propagation :
Problèmes :

Le Barbonandropogon Bothriochloa barbinodis

Origine : Introduit au … en provenance d’Amérique du nord
Utilisations :
Modes de propagation :
Problèmes :

L’Herbe de la Pampa Cortaderia selloana

Origine : Introduit au … en provenance du Sud de l’Amérique latine
Utilisations :
Modes de propagation :
Problèmes :

Les Griffes de sorcière Carpobrotus spp

Origine : Introduit au … en provenance d’Afrique du Sud (région du Cap de Bonne espérance)
Utilisations :
Modes de propagation :
Problèmes :

Le Caulerpe : Caulerpa taxifolia

Origine : Introduit au ? en provenance de l’Océan indien
Utilisations : Voici une algue marine dont on connaît parfaitement l’histoire de son introduction en Méditerranée. C’est l’aquarium de Monaco qui a provoqué l’introduction accidentelle de l’algue qui s’est ensuite propagée de proche en proche.
Modes de propagation : Comme la Posidonie, la Caulerpe se développe beaucoup par voie végétative (production de rhizomes traçants). Mais cette algue fructifie également les semences sont véhiculées efficacement par les courants marins.
Problèmes : La caulerpe produit des toxines qui éliminent les autres algues. De plus, sa croissance est beaucoup plus rapide que la Posidonie par exemple. Enfin, la pratique de la plaisance a beaucoup accéléré l’infestation, du fait que les ancres arrachent facilement les tiges de caulerpe qui peut se réimplanter facilement plus loin dans la mer.

Les Jussies exotiques Ludwigia spp

Origine : Introduit au ? en provenance d’Afrique latine
Utilisations : Les jussies ont été introduites comme plantes d’agréments pour les bassins des particuliers
Modes de propagation : bouturage, production de graines, souches rhizomateuses
Problèmes : les jussies sont des plantes amphibies qui poussent très rapidement. Elles sont capables de recouvrir la totalité d’un cours, d’un étang ou d’un marais en quelques semaines si les conditions sont favorables. Ces plantes entravent ensuite la circulation de l’homme dans les milieux aquatiques, elles empêchent la pénétration de la lumière dans l’eau et provoquent un appauvrissement biologique des milieux qu’elles recouvrent. L’apport de biomasse peut également être un facteur aggravant l’envasement et l’eutrophisation des pièces d’eau.
Moyens de lutte : les Jussies sont maintenant interdites à la vente par arrêté ministériel mais le niveau d’infestation des milieux aquatiques est important. La gestion des niveaux d’eau et du réseau hydraulique (vannes et martelières) et la seule solution pérenne (les campagnes d’arrachage ou de traitement chimiques sont assez inefficaces).