Splendeurs natur’ailes n°16 : La Crau, des plumes et des galets.

Voilà ! notre petit tour d’horizon Européen est terminé.
Cette semaine, je voulais vous ramener en Camargue car j’y ai fait, dernièrement, de belles rencontres.
C’était sans compter sur l’impact destructeur que les coups de feu ont sur mon moral depuis l’ouverture de la chasse au marais.
Alors, j’ai changé mon fusil d’épaule… Je vous propose donc, cette semaine, une balade sur les “Coussouls”de Crau…
Et c’est bien mieux qu’un lot de consolation !
Sublimée par Van Gogh, louée par Mistral, il existe une terre provençale, entre Alpilles et Méditerranée, qui est un sanctuaire insoupçonné pour certaines espèces menacées de disparition.
Depuis des millénaires, cet ancien delta de la Durance qui, suite à un caprice géologique, a décidé un beau jour de quitter sa mer (!) pour se marier avec le Rhône, a été occupé par l’homme.
Il est toujours venu ici pour y faire paître ses moutons. En témoignent de nombreux vestiges de bergeries datant de l’époque gallo-romaine.
Cet apparent désert a été, au fil des ans, rétréci, dénaturé et abîmé par l’homme (comme après cette grave pollution aux hydrocarbures, survenue en 2009, à la suite d’un accident industriel).
Heureusement, que dans les années soixante dix, la valeur patrimoniale de cette steppe semi-aride, unique en Europe, avait déjà été prise en compte.
Au printemps 2012, fier d’avoir mon premier appareil photo reflex, c’est vers elle que je suis allé.
Elle m’a accueilli en son sein durant une saison.
Je l’ai aimée et respectée et, en retour, elle m’a livré quelques uns de ses secrets.
Aujourd’hui, je viens d’apprendre qu’on ne peut plus y rentrer suite à des abus, comme les “raves party” non autorisées, ayant entraîné des dégâts écologiques.
Ils n’y subsistent plus qu’environ dix mille hectares de Coussouls originels (nom donné par les bergers à cette steppe faite de pelouses sèches, parsemée de millions de galets arrachés aux Alpes et déposés par la Durance).
Peu de racines d’arbres ont réussi à percer le “poudingue” (sous-couche du sol constituée par des dépôts alluvionnaires pétrifiés au fil du temps), accentuant ainsi la sensation étrange d’évoluer dans un décor lunaire.
C’est pour cela que quelques margelles de puits anciens émergent de la platitude.
Cette plaine, faussement aride, recèle pourtant une faune et une flore remarquable.
Au milieu des salicaires, brachypodes et autres asphodèles, on peut, avec une bonne dose de chance, apercevoir des galets qui bougent…
Ne vous inquiétez pas, vous n’êtes pas forcément victime de l’effet secondaire d’une insolation…
Vous venez peut-être alors de rentrer dans le cercle très fermé de ceux qui ont eu la chance de croiser la route du mythique Ganga cata (alias la“grandoule”) qui a trouvé ici le dernier bastion de survie en France.
13 avril : Le petit peuple du clair de lune s’est endormi, le jour se lève.
Cette brume matinale, c’est la promesse d’une belle journée de printemps.
Les troupeaux vont se répandre sur la steppe.
Une Alouette calandre, un mâle dopé à la testostérone, visiblement agacé par ma présence, virevolte autour de moi.
Je m’éloigne discrètement du territoire de cette belle géante de la famille qui, elle aussi, se fait de plus en plus rare dans l’hexagone.
Plus loin, un Milan noir s’est posé sur un tas de cailloux, près d’un troupeau de mérinos avec, en toile de fond, le complexe pétrochimique de Fos et les lueurs des torchères.
Je prends une photo.
Entre archaïsme et modernisme, en une image, deux mondes se télescopent…
Texte et Photos : Hervé Bertozzi
Au pays des oiseaux marcheurs les alouettes sont reines…  Alouette calandre

Alouette calandrelle, la naine de la famille et le mimétique Cochevis huppé.

Alouette des champs dans une position perchée peu commune.

Un poussin d’Outarde canepetière attend sagement le retour de maman, confiant dans sa tenue de camouflage.
Il devient de plus en plus rare de croiser la route du petit dragon provençal, le magnifique Lézard ocellé.

Lièvre.

Si la Crau n‘existait pas, il aurait fallu l‘inventer rien que pour cet oiseau là : le Ganga cata.

Dans un tas de cailloux, une famille de Faucons crècerellettes partagent leur espace avec des jeunes Lapins de garenne.

En attendant que maman et papa reviennent des courses.

Si le Pipit rousseline est nicheur sur le Coussoul, le Pipit à gorge rousse n’y est que de passage.
Tout comme les charmants petits Faucons Kobez.

Les bergeries et leurs alentours peuvent offrir un havre de paix pour les nichées de certaines espèces, telles les Chevêches d’Athéna, l’Œdicnème criard ou encore les Perdrix rouges.
A la fin de l’été la plaine est traversée par une foule de migrateurs comme le rare Traquet oreillard et le commun Traquet motteux…

Ainsi que les confiants Pluviers guignards, la Pie-grièche écorcheur…

La Pie-grièche à tête rousse. Seule, la Pie-grièche méridionale restera au pays pour essayer de protéger ce qui reste de ce merveilleux écosystème…