Splendeurs natur’ailes n°17 : Alpilles, écrin pour oiseaux de lumière.

Alphonse Daudet, le chantre des Alpilles, dans ses “lettres de mon moulin” exprimait ainsi son amour pour ce coin de Provence : “…endroit béni, que de fois ne suis-je venu là, me reprendre à la nature, me guérir de Paris et ses fièvres…”

Aujourd’hui, à ses pieds, des éoliennes tournent à la place des moulins et les piquets de clôtures des riches propriétés privées ont poussé plus vite que les bâtons de bergers.

Pourtant, ce petit massif calcaire continue d’exercer un magnétisme considérable sur tous les amoureux de nature.

En me levant, tous les matins, j’aperçois de ma fenêtre, sa croupe occidentale arrondie comme un gros chat endormi.

Elle me barre l’horizon, fixant irrésistiblement mon premier regard sur le monde extérieur.

Mes amis, cette semaine, nous allons prendre un peu de hauteur par rapport à la plaine de la Crau.

Je vous propose d’aller vous immerger dans cette île rocheuse, devenue parc naturel régional, qui abrite encore plus de cent vingt espèces d’oiseaux, sans compter de nombreux reptiles et mammifères…

Avoir baptisé ce petit massif, qui n’atteint même pas les 500 m d’altitude, les “petites Alpes” montre à quel point les Provençaux on le sens de la galéjade et une imagination débordante.

Tel un vaisseau disloqué, refoulé sur les galets de la Crau par les coups de boutoir du mistral, cette “montagnette” d’une trentaine de km de long, parait néanmoins bien plus imposante qu’elle ne l’est réellement.

Cette illusion d’optique est peut-être due au fait qu’elle émerge subitement d’une plaine qui a du mal à dépasser le niveau de la mer et que la blancheur aveuglante de ses arêtes calcaires pourrait faire penser à quelques sommets enneigés.

Allez zou ! Finalement, Ils avaient raison nos aïeux qui l’ont façonné, de baptiser ainsi cet îlot minéral qui n’a rien perdu de son pouvoir de séduction.

J’assume mon chauvinisme en considérant que c’est ici que palpite le cœur de la Provence profonde, même si des “estrangers” en carence de soleil s’y sont établis en nombre.

C’est bien cette lumière unique qui nimbe le massif avec ces ombres bleues nichées aux creux des vallons qui rendent magique ce troisième côté du “triangle d’or” composé de la Crau et la Camargue.

Les pins d’Alep, les chênes verts et kermès étouffent inexorablement le massif au détriment de l’exceptionnelle faune qu’il abrite.

Il reste heureusement l’arbre-roi qui fait couler l’or vert de la Provence et qui a su passer à travers des épisodes noirs de gel et de feu destructeurs : l’olivier.

Des localités aux noms qui chantent, comme Saint-Rémy, Maussane, Paradou, Mouriès, Fontvielle ou encore Aureille et Eygalières, dansent autour de l’antique forteresse des Baux…

Comme les rondes que continuent de danser les jeunes filles en habit d’Arlésiennes, lors des fêtes de villages…

Car les traditions sont ici enracinées dans la pierre, comme si elles devaient nous protéger d’un présent qui ne rassure plus vraiment…

Dans l’intimité de cette cathédrale minérale, j’y ai rencontré des oiseaux de lumière lors de moments inoubliables que je suis heureux de partager avec vous.

Texte et photos ; Hervé Bertozzi


Sous les yeux du géant de la famille, le Martinet à ventre blanc, les “chasseurs d’Afrique”, comme on les appelle ici, ont investi une ancienne gravière au cœur du massif.
Deux couples de squatteurs plus ombrageux, des Rolliers d’Europe, n’ont aucun scrupule à occuper les galeries creusées par les Guêpiers. Inutile de vous expliquer pourquoi tous ces oiseaux arc-en-ciel me tiraient hors du lit tous les matins…

Les insectes dans les amandiers en fleurs attirent des petits insectivores comme le Pouillot véloce ou le Pouillot de Bonelli
     

Combien de griffures aux mollets, de jurons blasphématoires de noms d’oiseaux (qui n’existent pas), m’aura-t-il fallu avant de réussir quelques clichés de ces maudites Fauvettes méditerranéennes…
C’est peut-être pour ça que je les aime tant…
Fauvette passerinette.       


Fauvette pitchou

  Couple de Fauvettes mélanocéphales.

Hypolaïs polyglotte
Bruant zizi.
         
Linotte mélodieuse.
La sentinelle de la forêt : le Geai des chênes.
Deux oiseaux rares qui ouvrent les portes du rêve: Le Monticole bleu et le Tichodrome échelette.
L’aigle des garrigues, maître incontesté des Alpilles.
Dans la grisaille du déclin des espèces, percent quelques lueurs d’espoir : cette année, les 4 couples d’Aigles de Bonelli ont donné 7 aiglons à l’envol !
Le Circaète Jean-le-Blanc, de la même taille que le “Bonelli” mais bien moins puissant s’est, lui, spécialisé dans la chasse aux reptiles comme cette couleuvre d’Esculape.

Certains soirs d’hiver, les ombres s’allongent et le mistral s’engouffre dans les combes glaciales.
Une lune blafarde apparaît. C’est alors que retentit l’écho du chant d’amour du géant de la nuit.
J’ai appris qu’environ 60 couples de Grands Ducs d’Europe se partagent le massif… Fabuleux, non ?

Certains ont inventé le terme de “nuisible” pour se donner le droit de tuer.
Il est vrai qu’un sanglier qui ose retourner quelques mottes de terre sur un green de golf ou un renard qui croque un faisan
d’élevage, ce n’est pas tolérable !
Allez zou ! Bientôt l’automne et ses balades romantiques en forêt…